Le peuple kurde est sans doute un des peuples oubliés par ce que l'on appelle le « concert des nations ». Colonisé par des pays en voie de développement (Turquie et Iran), il n'a pas bénéficié du regard des défenseurs et chercheurs occidentaux de la décolonisation. Et pourtant, avec 40 millions d'habitants et par son action au cours de la première guerre du Golfe, les Kurdes ont bénéficié en 1991 d'une résolution des Nations Unies qui aboutira à la création du Kurdistan au nord de l'Irak, qui a un parlement autonome et une garantie de sécurité. Pendant la guerre contre Daech et leur engagement fort (15 000 morts) et efficace, ils ont émergé comme des acteurs majeurs de la région. Malgré tout, la lutte avec l'État turc n'a pas bénéficié des mêmes soutiens et leur génocide sous Atatürk et la répression permanente dont ils sont l'objet restent un combat actif. Les études universitaires sur le peuple kurde ne cessent de se développer et dessinent même une discipline nouvelle : la kurdologie.
Cet ouvrage collectif de niveau d'excellence universitaire décrit cette histoire mouvementée de l'Antiquité aux conflits kurdes en Turquie en 2010. Les paysages fortement changés de la région ces dernières années sont évoqués en fin de volume.
Les chapitres de la guerre du Golfe à nos jours impactent directement l'actualité, qui est remise en cause par une sorte de déplacement de la défense des démocraties vers une conciliation avec les États forts au détriment des peuples minoritaires au sein des États-nations.
Si cette compilation s'illustre par sa précision historique et son analyse politique, il aurait été intéressant pour le lecteur que les aspects culturels, artistiques et le dynamisme d'une intelligentsia en développement depuis la fin du XIXe siècle aient été mis en valeur avec plus d'informations.
Ce livre est, pour la première fois, une somme qui honore les auteurs et milite pour que l'oubli ne soit pas le prix des reconfigurations internationales dont nous sommes témoins aujourd'hui.
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