Le corsaire, l’astronome et l’armateur

André Zysberg
Editions du Cerf
Jean Baptiste Nicolas
03/06/2025
Relecture :
Histoire universelle
Temps de lecture :
1
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Danielle et Gilbert Buti, Claudine et André Zysberg,

Le corsaire, l’astronome et l’armateur. L’aventure d’un vaisseau marseillais dans la mer du Sud (1707-1711),

Le Cerf, 2025, 352 pages

On sait le succès incontestable auprès du grand public des ouvrages de littérature maritime, de Cecil Scott Forrester à Fabien Clauw, en passant par Patrick O’Brian, Alexander Kent, ou le trop oublié Paul Chack. Pour prolonger ces lectures, les passionnés de la mer se plongeront avec plaisir dans le dernier livre des époux Buti et Zysberg, qui raconte l’épopée du Saint-Jean-Baptiste, armé par Jean-Baptiste Bruny et ses amis investisseurs, conduit par le capitaine Jean-François Doublet et accompagné par un capucin astronome, le Père minime Louis Feuillée, témoin précieux de l’expédition.

Non sans talent, les auteurs narrent les quatre années du voyage de ce navire, parti de Marseille pour commercer avec la côte ouest de l’Amérique du Sud. Au travers de cette expédition, c’est toute l’histoire du commerce maritime interlope, alors à ses balbutiements, qu’esquissent les auteurs. Pacotille, rubans de dentelle, toiles, taffetas, chapeaux, papier, savons, chandelles… toute une production française, mais aussi régionale, y sera là-bas convertie en métal précieux, lui-même revendu, une fois le navire de retour à Marseille, à l’hôtel de la Monnaie.

Historique car fondé sur des archives – Fonds Jean-Baptiste Bruny, manuscrit du journal de Doublet, archives de la chambre de commerce, etc. – cet ouvrage se laisse toutefois lire aisément, malgré quelques dizaines de pages un peu longues au début. Passé ce cap, le lecteur est emporté par l’aventure, les aiguades, le passage du Cap Horn, le difficile commerce avec les colons, pourtant si désireux des produits du Vieux Continent, les expéditions scientifiques du P. Feuillée.

À travers ce récit, le lecteur redécouvre l’aspect résolument financier du commerce maritime. Si, à l’aube du XVIIIe siècle, Marseille est une cité résolument ouverte sur le monde, c’est grâce aux capitaux de grands investisseurs privés, et notamment de la place parisienne, qui financent – et avec quels risques ! – les expéditions vers l’Asie, l’Afrique ou les Amériques. Malheureux, le placement est perdu en son entier ; heureux, il produit des bénéfices énormes, à la base des grandes fortunes marseillaises et prémices de l’ascension d’une famille.

Fouillé, documenté, œuvre d’historiens réputés – on se rappelle notamment le superbe Colère de Dieu, mémoire des hommes de Gilbert Buti, consacré à la peste à Marseille (Le Cerf) – ce livre est à offrir à tous les amoureux d’histoire ou de littérature maritimes.

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